combattre
COMBATTRE
Etymologiquement : de cum :avec et battere : battre. Combattre c'est donc se battre avec l'autre.
Comment pourrait il me combattre si je ne suis pas là ? Comment puis-je ne pas être là en restant présent ?
Ces questions qui peuvent paraître saugrenues sont au centre d'une véritable non violence appliquée.
Dans les exercices de combat libre, que nous faisons lors de notre pratique des arts martiaux, nous réalisons combien l'issue de ceux-ci est incertaine. Parfois nous réussissons à appliquer une technique , le plus souvent nous échouons. Nous savons combien il est courant qu'un débutant réussisse à assener un coup à un ancien. On évoque alors son manque d'expérience, sa malhabilité, ou la magnanimité du gradé qui l'a ménagé, mais le fait est que ces coups « accidentels » sont monnaie courante dans les dojos.
Le gradé a t'il faillit ? Non , il est simplement dans l'ilusion. Si il observe la situation sincèrement, il constatera qu'il ne peut combattre qu'avec des personnes qui ont suivi le même chemin martial que lui. Un boxeur combat bien un autre boxeur, un judoka, un autre judoka, un aikidoka un autre aikidoka. Des lors que deux pratiquant de disciplines differentes combattent ensemble, il faut établir des règles afin de définir ce qui est autorisé, et ce qui est interdit.
Touché par un débutant ; souvent incapable de vaincre un pratiquant d'une autre discipline ; ces années d'entraînement n'ont elle servies qu'a conforter un sentiment de compétence à l'aide de victoires convenues, et de combats en circuit fermé ?
On peut rétorquer qu'il existe des techniques de combats qui elles sont réellement redoutables, utilisées par l'armée, elle sont le fruit d'expériences de guerre, de combat rapproché, de maintien de l'ordre ; elle représentent la quintescence de l'efficacité, et là, gare à l'adversaire.
Mais si deux personnes maîtrisant ces techniques combattent ensemble, est il possible que les deux gagnent parce qu'elle sont les plus fortes ?
La loi du plus fort est un serpent qui se mord la queue; je pourrais sans doute devenir le plus fort du club, du village, de la région, du pays, du monde, mais pas contre n'importe qui, n'importe ou, n'importe quand.
Alors à quoi bon toute ces années , je ne suis même pas sur d' assurer ma protection.
Mais se protéger est-ce détruire ou soumettre « l'autre » ? nous avons vu qu'il fallait être deux pour combattre ; si je ne combat pas, l'agresseur essaye alors de me battre , me frapper, moi je veux simplement me protéger, ne pas être blessé, je veux simplement rétablir la paix. Si je me protège correctement je ne laisserais pas le judoka se mettre à distance pour m'accrocher, je ne laisserais pas le boxeur me cadrer et je n'offrirais pas d'attaque à l'aikidoka.
Dans l'art du combat,deux qualités indissociables sont fondamentales : la première est centrale dans l'enseignement de tous les arts martiaux , c'est le courage, c'est lui qui permet de rester en éveil, de ne pas fuir, d'affronter la difficulté ; le second n'est quasiment jamais abordé parce que trop
souvent confondu avec manque de courage : c'est la prudence.
La prudence implique une prise de distance avec l'adversaire , le courage implique de lui faire face afin de gérer le danger. Nous pensons alors : « je ne te combat pas , mais je ne te laisserais pas me détruire, »
Cette attitude paraît « fleur bleue »? Mais au cours de l'histoire, de nombreux maîtres, stratèges, combattant on appliqué cette stratégie. Une anecdote illustre bien ce propos.
Alors qu'il se rendait en chine sur un bateau , Jigoro Kano, fondateur du Judo ( la voie de la souplesse) , fut abordé par quelques personnes qui l 'ayant reconnu, lui demandèrent si il accepterai
un combat amical avec un lutteur russe qui se trouvais sur le bateau. Le voyage étant long et les occupations peu nombreuses le maître accepta. Jigoro Kano mesurait environ un mètre cinquante et paru bien chétif face à l'énorme lutteur russe qui lui rendait bien deux têtes. Le combat s'engagea
et a chaque fois que le lutteur essayait de saisir le maître, celui-ci s'extirpait comme un serpent de la prise de son adversaire. Après un long moment le lutteur épuisé s'arrêta et dit « vous ne combattez pas , vous vous échappez tous le temps, sachez que si je vous avais attrapé j'aurais pu vous broyer »
Jigoro Kano aquiesca et lui répondit : « justement il est hors de question que vous m'attrapiez... ».
D'une manière moins anecdotique, nous constatons que Machiavel , diplomate et philosophe du xvème siècle , dans son texte nommé : « l'art de la guerre » nous livre une stratégie assez semblable : « ... ce qu'il faut observer avec le plus grand soins, c'est de ne jamais mener une armée au combat, lorsqu'elle doute de la victoire./.../ Il faut toujours alors éviter la bataille, imiter Fabius qui, en choisissant des postes escarpés, otait à Annibal tout moyen d'aller l'attaquer, ou, si vous craignez que dans ces postes même l'ennemi ne marche contre vous, quittez la campagne et dispersez vos troupes dans des places fortes, afin de le fatiguer par des sièges. » il revient plus loin sur cette notion de prudence : « ...lorsqu'on a affaire à un ennemi qui veut le combat à quelques prix que ce soit, il n'y a pas d'autre moyen alors que de se maintenir à cinquante milles de lui, pour avoir le temps de décamper lorsqu'il marche vers vous »
Encore la prudence, quand, dans le roman « La parfaite lumière » qui narre la vie romancée de Myamoto Musashi , samouraï historique et auteur du GoRin No Sho (ecrit sur les cinq roue) manuel stratégique, nous retrouvons le héros conduisant une barque vers une île, avec a son bord Sasaki Kojiro jeune samouraï qui l'a provoqué duel. Arrivé sur l'ile le jeune Sasaki saute de la barque, fait quelques pas sur la plage et se retourne pour faire face à Musashi qui, séloigne tranquillement avec la barque.
Sortir du combat, ne pas être la , ne pas donner à l'autre l'occasion de nous détruire.
Rétablir la paix, calmer la violence, mais comment faire pour faire taire ces pulsion qui nous animent lorsque nous sommes provoqué, comment anihiler cette envie d'en découdre et de détruire celui qui nous menace?
Je dirais en devenant des saints, ......ou des experts.
La foi comme arme.
A travers l'histoire, l'exemple de Mohandas Gandi est l'un des plus emblématique. Particulièrement influencé par la Bible et imprégné de culture non violente, il appliqua une stratégie dont la matrice fut la non-violence : le satygraha, « l'étreinte de vérité » et l'Ahimsa, « le refus de nuire », d'utiliser la violence. Sans entrer dans le détail, Gandi appliquant ces principes réussi à faire quitter l'Inde au colons Anglais. Sa foi lui donnant le courage de ne pas réagir aux violences anglaises. Cette foi il l'a transmise à des millions d'hommes et de femmes qui comme lui desobeirent passivement.
Gandi et sa stratégie sont un exemple , mais est-il incontournable d'avoir une telle foi, afin de rétablir la paix.
Les arts martiaux traditionnel auraient ils ainsi traversés l'histoire, si leur fondements n'étaient qu'illusion ? Ou avons nous perdu au fil du temps la substantifique moëlle ?
La question est posée mais la réponse n'a en fait que peu d'importance.
En effet sans savoir ce qu'il en était réellement auparavant, nous pouvons juger par nous même que l'étude des arts martiaux offre des moyens pour développer une compétence dans la gestion d'actes violents, nous appuyant sur celle-ci il nous devons pouvoir agir afin de nous protéger et d'établir une contact d'une autre nature avec notre adversaire.
Faire la guerre est une action, faire la paix est un engagement, et celui ci ne se fait que par le dialogue. De fait, rétablir la paix et arrêter la destruction, dans le respect des parties, n'est possible que dans le dialogue.
C'est cette expertise qui associe, courage et prudence, action et parole que nous pensons être le but ultime des arts martiaux.
Dès lors les entraînement, les compétitions redeviennent ce qu'il n'aurait jamais du cesser d'être : des jeux de combats, ou est cultivé le rapport à l'autre, à la violence, à la paix.